La crise sanitaire accélère la mutation des points de vente physiques. Avec le développement du e-commerce, les consommateurs peuvent tout acheter, n’importe où et à tout moment. Les pure player du e-commerce peuvent vous offrir des centaines de produits pour une seule catégorie de produits. Cette multiplication des choix induite par ce modèle se traduit pour les points de vente par la baisse de productivité de l’espace et par une hausse des démarques en fin de saison pour écouler les produits invendus.

Les retailers traditionnels doivent se transformer pour se rapprocher du modèle idéal, c’est à dire un seul canal avec des points de contacts physiques et digitaux ; et un des leviers, outre l’omnicanalité, est la reconfiguration de leur réseau de magasins. Cette reconfiguration a un impact important sur la façon dont ils construisent leur offre produits.

La crise sanitaire accélère le redimensionnement et la différentiation des magasins

L’adaptation des réseaux de points de vente à la crise sanitaire prend plusieurs formes selon l’enseigne. La première conséquence est l’accélération de la fermeture ou la cession des magasins les moins rentables. Une autre tendance est le downsizing ou le redimensionnement de certains magasins par la réduction de la surface : la largeur de l’offre du magasin redimensionné doit alors être réduite, et ajustée à la clientèle spécifique du magasin.

On observe également de plus en plus une mutualisation des points de vente avec d’autres enseignes commercialisant des produits ou des services complémentaires : un simple corner ou un rayon complet du magasin est confié à une autre enseigne, ce qui permet d’accroître le flux de clients dans le magasin et d’améliorer la rentabilité du magasin.

Une autre conséquence est que les retailers développent des plans pour relocaliser des magasins : ils privilégient la proximité avec les consommateurs, pour tenir compte de l’essor accéléré du télétravail et de la tendance des clients à réduire les longues distances pour leurs achats ; ainsi, certaines enseignes plutôt présentes historiquement dans des centres commerciaux loin des centre villes développent un réseau dans des zones de plus forte densité, ce qui nécessite là aussi de réduire l’offre pour tenir compte de la réduction de la surface de vente.

Enfin certaines enseignes créent de nouveaux concepts dérivés du concept principal afin d’élargir et de renouveler la cible des clients. Il peut s’agir par exemple d’une montée en gamme, d’une extension de la gamme ou au contraire d’une spécialisation au sein de l’offre habituelle.

L’optimisation de la construction de l’offre produits devient de plus en plus nécessaire

Cette accélération de la reconfiguration du réseau de magasin renforce la nécessité d’optimiser la différenciation de l’offre pour tenir compte de cette segmentation de plus en plus complexe. Les assortiments doivent être encore plus localisés et centrés sur le consommateur. Il est plus complexe de différencier l’offre par magasin, lorsque ceux-ci ont des formats et des caractéristiques très différentes, que de gérer un référencement globalement commun à l’ensemble des points de vente.

L’intelligence artificielle permet de mieux répondre à ces nouveaux défis. Les algorithmes peuvent identifier les attributs du produit expliquant les différences de performance entre les produits et ainsi recommander la gamme idéale selon le segment de magasins. Ces attributs sont par exemple le niveau de prix du produit, sa forme, sa matière, sa couleur, sa marque, sa saison, son cycle de vie, les catégories de clients auxquels il s’adresse…. L’objectif est de différencier l’assortiment localement en fonction des attentes des consommateurs.

Pour cela, la segmentation des magasins dot être plus fine. Aujourd’hui, les retailers regroupent les magasins en fonction d’une combinaison d’un nombre limité d’attributs tels que le volume et l’emplacement. On peut maintenant prendre en compte beaucoup plus de critères, et en particulier ceux qui sont liés aux attentes spécifiques des clients, pour les croiser avec les caractéristiques des produits.

Il faut aussi tenir compte des contraintes d’espace et de présentation : les minimums de présentation qui permettent de crédibiliser l’offre, mais aussi l’obligation de proposer le cœur de l’offre, c’est-à-dire les produits qui correspondent à l’image de l’enseigne et qui doivent être disponibles dans l’ensemble des magasins ; ou au contraire les spécificités régionales. Il s’agit donc de trouver le meilleur compromis entre une offre véritablement localisée et un ensemble d’objectifs et de contraintes. Cette complexité requiert un effort de planification plus important que seule une analyse de nombreuses données et des algorithmes faisant appel à de l’intelligence artificielle peuvent aider à gérer.

D’autre part, on le voit, la gestion de l’offre s’appuie sur de nombreuses données internes : par exemple les caractéristiques des produits définies dans le PLM ou les données sur les clients, provenant des systèmes de fidélisation ; ou externes, les réseaux sociaux, les relevés de prix des concurrents, les tendances par catégorie de produit provenant d’études de marché. Seul un certain degré d’automatisation permet de maîtriser l’ensemble de ces données. L’exploitation de ces nouvelles sources de données internes et externes améliore considérablement la compréhension des besoins des clients par le retailer et permet de mieux détecter la performance prévisionnelle des produits et l’assortiment idéal par magasin.

Cette automatisation permet également une plus grande vitesse de décision lors du processus de construction et d’actualisation de l’offre. Les activités répétitives sont traitées par le système, ce qui permet non seulement une décision plus rapide, mais aussi une concentration sur les exceptions, et une meilleure qualité de jugement.

D’autre part, la situation actuelle – la crise sanitaire – souligne l’importance de pouvoir faire face aux incertitudes de la prévision et de la planification. Il faut par exemple avoir la flexibilité d’adapter rapidement l’offre au nouveau contexte. Pour cela, il est nécessaire d’avoir une visibilité en temps réel sur la performance effective de l’offre pour prendre des décisions rapidement telles que l’ajout ou le retrait de certaines références dans certains magasins.

L’optimisation de l’offre a un impact immédiat sur la performance du retailer

A partir d’une offre mieux localisée, il est également plus facile de prévoir la profondeur de l’offre, c’est-à-dire l’engagement d’achat qui va être crucial pour la performance financière du retailer. Le cycle de vie du produit, les magasins qui lui sont assignés, sa courbe de saisonnalité, sa performance prévisionnelle, son minimum de présentation, données qui sont définies dans le plan d’assortiment, permettent de mieux prévoir les quantités vendues et ainsi les quantités d’achat.

L’amélioration de la construction de l’offre et son adéquation avec les consommateurs est donc décisive dans la performance globale des retailers : augmentation des ventes parce qu’on choisit les produits les plus performants, diminution des ventes perdues parce qu’on a suffisamment acheté, meilleur écoulement des stocks et réduction de la démarque pour écouler les invendus grâce à une meilleure adéquation de l’offre aux consommateurs.

Pour toutes ces raison, la gestion de l’offre fait partie des priorités actuelles de nombreux retailers, la crise sanitaire ayant servi d’accélérateur.